Lettre d’info n°24 – 2019
Chèr(e)s Ami(e)s,
Une phrase d’Albert Jacquard me tient en éveil ces derniers jours : « L’important, c’est de se savoir « être », un caillou “est”, mais il ne le sait pas, moi “je suis” et je suis capable de le savoir à partir du moment où je participe à la communauté humaine ! ».
Participer à la communauté humaine, être conscient de notre interdépendance avec toutes choses, serait la différence qui fait de moi, un Être Humain et non un caillou. En conscience de mes responsabilités, face aux actes et aux paroles que je pose, j’en appréhende et en assume les conséquences, ces « effets papillons » que je ne cesse de déclencher.
Un talent que possèdent les Shamans Kogis qui, par leur maturité et leur travail sur eux-mêmes, sont à même de penser large, de maintenir l’équilibre des relations, y compris les plus inconfortables, afin d’éviter le dysfonctionnement du système. Des êtres humains debout, dont la quête première s’appelle recherche d’harmonie.
Dans une telle vision du monde, le lien et la qualité de la relation sont considérés comme « sacrés », car ils sont au cœur de la vie et au final de la santé des gens, membres de la communauté.
Il ne s’agit pas d’altruisme, mais de co-nnaissance des lois qui régissent le Vivant. Ils sont en pleine conscience des risques de la loi de dilatation – rétraction, accueil, rejets, que déclenchent nos interrelations et leurs conséquences. Ils savaient bien avant nos scientifiques que cette loi induit nos capacités d’éveil et d’évolution.
Ai-je contribué à nourrir de l’ouverture, de la joie, et donc de la valeur (Dilatation); ou ai-je contribué à fermer des portes, déclenché de la tristesse, du repli sur soi, des tensions et donc rétréci le champ des possibles (Rétraction) ? Zigoneshi pour les Kogis, Tonglen pour les Tibetains, Ayni pour les Quechuas, la conscience des relations qui unissent toutes choses, permettent aux polarités (Yin Yang) de rester complémentaires donc créatives et sont considérées comme sacrées dans nombre de traditions, là où elles sont malmenées, voire ignorées, dans nos sociétés modernes.
Une découverte scientifique de la microbiologiste Lynn Margulis, en 1970, nous rappelle que la prise en compte du lien, de la relation, n’est ni moral, encore moins idéologique, mais que c’est un principe de base, constitutif du vivant. Elle évoque cette capacité des bactéries à unir leurs forces, en se regroupant, pour coopérer donnant ainsi naissance à la première cellule. Cette théorie, connue dans le monde scientifique sous le nom d’endosymbiose, démontre que ces petites entités simples que sont les bactéries, ont su s‘associer pour contribuer à créer un organisme plus complexe, plus performant et plus évolué, dont nous, et tous les êtres du monde vivant, sommes composés. Contrairement aux idées reçues, la nature n’est pas un monde uniquement fait de compétition et d’égoïsme, mais c’est une valeur symbole de qualité des relations, la coopération qui serait à l’origine du Vivant.
Oser la coopération, c’est admettre que l’autre, qui n’est pas moi, m’est nécessaire pour apprendre et grandir. C’est établir la confiance comme préalable pour nourrir des relations de qualité. La confiance ? une deuxième valeur centrale, sans laquelle aucune démarche ni aucun processus coopératif ne peuvent durablement être mis en œuvre. Cette valeur appelle l’humilité pour identifier et progresser dans nos zones de « fragilité », pour développer la solidarité, base du « faire ensemble ». Le biologiste Pablo Servigne souligne que « les groupes composés d’individus plus coopératifs survivent mieux ». Une possible explication à la longévité des peuples premiers, comme les Kogis ?
Ce sont ces valeurs : la confiance et la coopération qui nous ont permis d’innover avec France 2, en demandant à ce que, pour la première fois, un « appel à dons » soit fait durant l’émission « Rendez-vous en terre inconnue ». Confiance de France 2 pour le sérieux et la gestion de notre Association et coopération avec les Kogis, pour que ce documentaire ne soit pas juste un divertissement mais leur apporte de l’aide concrète et réelle.
Ce sont encore ces valeurs qui permettent d’investir les relations, de les rendre « vivantes », perceptibles afin de créer les conditions pour commencer à explorer une « intelligence collective ». Cette intelligence qui dépasse la somme des cerveaux et qui permet au vivant, à la nature, de s’adapter et d’inventer la suite de son histoire. « Lorsqu’un seul homme rêve, ce n’est qu’un rêve. Mais si beaucoup d’hommes rêvent ensemble, c’est le début d’une nouvelle réalité », Friedensreich Hundertwasser.
Une citation qui nous tient éveillés dans notre aventure auprès des Kogis.
Marie-Hélène Straus,
Présidente